Comment cela se passe pour la mère porteuse ?
Le sujet de la mère porteuse est un sujet très délicat qui est au cœur de notre société et s’invite souvent dans les débats politiques. Voici un extrait de l'exposé que j'ai fait en classe cette année. Chaque peuple étant caractérisé par ses propres coutumes et ses propres visions des choses le bien et le mal que l’on peut penser des mères porteuses est très différent d’un endroit à l’autre du globe, ce qui pose de façon encore plus confuse et délicate le conflit d’ordre moral qui s’est créé autour du sujet. Les variations en matière de législation d’un pays à l’autre ont largement contribués à ce qu’un tourisme procréatif voit le jour. Il n’existe pas de droit international au niveau des diverses techniques d’AMP (Assistance Médicale à la Procréation) ce qui peut conduire à certaines dérives, mais il serait un peu simpliste d’aborder le sujet de la gestation pour autrui (GPA) avec uniquement un œil de juriste ou même en ne parlant que d’éthique car le sujet de la mère porteuse est avant tout un sujet qui a pour point d’orgue le bonheur de nombreuses personnes qui ne choisissent pas cette solution parce qu’elle leur convient, mais uniquement parce qu’il n’y a pas d’autre solution pour avoir un enfant, ces personnes ont enfin le droit au bonheur après des années de souffrance et d’espoir.
On distingue deux types de mère porteuse, pour commencer il y a celle qui est dite traditionnelle, c'est-à-dire que c’est une femme qui est capable de porter un enfant, elle est inséminée de façon artificielle, soit par le sperme d’un homme qui sera le père, soit par celui d’un donneur. Une mère porteuse traditionnelle est la mère génétique de l’enfant car c’est son ovule de mère porteuse qui est utilisée pour la fécondation.
Il y a ensuite la mère porteuse qui est dite gestationnelle. Entre elle et l’enfant il n’y a pas de lien génétique. Ce sont les ovules de la mère ou d’une donneuse d’ovules qui sont fécondés par le sperme du père ou celui d’un donneur via une fécondation in vitro. Ce n’est que par la suite que le transfert de l’embryon se fera dans l’utérus d’une autre femme qui sera alors une mère porteuse gestationnelle.
Tous les couples qui ont des problèmes de fertilité n’ont pas recours à la GPA, en règle générale, la gestation pour autrui intervient dans le cas d’une infertilité de la femme qui est due soit à une absence d’utérus, soit à une déformation et n’a donc pas d’autres solutions pour avoir un enfant, hormis l’adoption dont on connaît les difficultés. La mère porteuse se fait implanter l’embryon du couple géniteur et elle ne fait que prêter son utérus le temps de la grossesse. Il arrive également que des femmes qui ont des maladies génétiques graves et (ou) héréditaires veulent avoir un enfant sans prendre le risque de leur transmettre (comme pour le sida par exemple). D’autres encore veulent un enfant sans avoir à en subir les désagréments, (douleurs, déformations, cicatrices, élargissement du bassin..), ou même veulent être mère mais ne sont pas prête à arrêter un travail trop prenant. Enfin, parmi les gens qui ont recours aux services des mères porteuses, on retrouve également les couples homosexuels qui revendiquent le droit de pouvoir avoir un enfant, soit par le biais de l’adoption, soit par la gestation pour autrui.
Sans parler du reste du monde comme par exemple les Etats-Unis où la pratique de la mère porteuse est légale et même assez commune, au sein même de l’Europe, les législations sont divergentes. Comme l’Union Européenne ne dispose pas d’une loi commune à tous ses états membres, chaque pays reste libre de sa propre législation en la matière. En France, la pratique de la mère porteuse est interdite. Depuis 1994, l’article 16-7 du code civil dispose que : toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle . La mère porteuse est seule reconnue comme mère biologique. Le recours à une mère porteuse est punissable de six mois d’emprisonnement et de 7.500 € d’amende pour l’intermédiaire qui permet qu’elle se réalise (médecin…). En France chaque année, on estime que 30 000 couples ont recours à l’assistance médicale à la procréation, mais seulement une centaine auraient recours à la gestation par autrui et pour ça, ils se rendent dans d’autres pays, mais les problèmes ont lieu à leur retour en France pour pouvoir faire reconnaître ce lien de parenté.
En Allemagne, la gestation par autrui est interdite par une loi qui stipule l’interdiction du don d’ovules, ainsi que par une loi sur la protection de l’embryon. La Belgique n’a aucun texte précis, mais le changement de filiation requiert une adoption. Ce recours est donc pratiqué, mais sans cadre légal. Le Danemark, quant à lui, n’empêche pas cette pratique et le changement de filiation requiert aussi une adoption, mais une loi empêche la gestation pour autrui contre rémunération. L’Espagne, interdit la GPA, mais le sujet ne fait pas réel débat public. L’Italie de même, interdit ce recours. La Grèce est le pays qui encadre le plus cette solution, sans pour autant l’interdire. Il y a des lois sur l’assistance médicale à la procréation. La loi helvétique empêche la GPA contre rémunération, exception faite des compensations qui rembourseront les frais de grossesse où les salaires perdus par la mère porteuse, la grossesse pour autrui sera réalisée uniquement si c’est la seule solution pour une femme de devenir mère et nécessitera une décision judiciaire. Une limite d’âge a été posée à 50 ans. Mais le bébé ne nécessite pas d’adoption pour obtenir la filiation.
Porter l’enfant d’un autre n’est pas une pratique nouvelle, ça existe même depuis toujours, seulement, depuis quelques années, les techniques de fécondation in vitro et d’insémination artificielle rendent possible le fait de porter un enfant conçu en dehors de tout rapport charnel, avec les ovocytes d’une autre femme. Interdit en France, autorisé dans certains pays, encadré dans d’autres, les mères porteuses n’ont pas fini d’animer les débats.
Bien souvent, le camp des personnes qui sont contre la gestation pour autrui est constitué de catholiques, de féministes, de médecins et de philosophes. A ce propos, la philosophe française Sylviane Agacinski a publié un ouvrage très virulent aux éditions Flammarion, Corps en miettes .
De son côté, l’Académie nationale de médecine a été consultée par les autorités et elle a conclue dans un rapport très prudent : Par la nature des problèmes qu’elle soulève, la gestation pour autrui interpelle avant tout la société et relève de la décision du législateur.
Parmi ceux qui veulent légaliser la pratique des mères porteuses, on retrouve le plus souvent les arguments suivants :
- La femme porte l’embryon d’un couple, et pour un couple ; elle ne donne en rien son capital génétique, elle ne fait que porter. La mère porteuse est la génitrice, la femme porteuse n’est que la gestatrice. (Nadine Morano UMP)
- Il ne faut jamais avoir peur de changer les lois en fonction des changements intervenus dans la société et la science. La gestation pour autrui reste le prolongement de toutes les procréations médicalement assistées. (Elisabeth Roudinesco historienne et psychanalyste)
- Il faut resituer ce geste comme un don, le don d’engendrement qui crée des liens de solidarité. Donner quelque chose de soi que l’autre n’a pas, ce qui n’est pas répandu dans nos sociétés individualisées ! (Serge Hefez Psychiatre)
- La légalisation des femmes porteuses est indispensable pour éviter les difficultés et le racket financier auxquels sont exposées les femmes qui relèvent de cette technique. (François Olivennes Gynécologue)
Et ce dernier argument semble très juste quand on pense que des pratiques de mères porteuses se développent dans les pays où le niveau de vie est très bas, comme par exemple en Inde où il est possible de se faire faire un bébé pour 10.000 euros.
Le côté éthique des questions que soulèvent le problème des mères porteuses est vaste et complexe, comment faire en légalisant la chose pour que ça ne devienne pas un métier praticable à temps partiel en restant chez soi…
Les chômeuses vont-elles en profiter ? La législation ne risque t’elle pas d’engendre un cercle vicieux avec d’un côté une demande d’enfant qui risque d’exploser et de l’autre des médecins qui seront tentés de s’orienter de plus en plus vers un marché de la création très prospère ? Et faire l’usage d’un autre ventre ne risque t-il pas de porter atteinte à la dignité puisqu’alors c’est l’existence même d’une personne aux conditions modestes que l’on met au service d’autrui !!!
Légal ou non, il parait normal que de porter l’enfant d’autrui soit dédommagé , mais comment fixer le tarif ? Peut-on évaluer raisonnablement ce que coûtent neuf mois de grossesse et un congé maternité, ainsi que de prendre des risques pour sa santé en enfantant ?
En admettant que les mères porteuses soient légalisées, qui va encadrer tout ça ? Les couples demandeurs et les mères porteuses pourraient être mis en relation par des associations agréées par l’agence de biomédecine par exemple, mais auront-elles les moyens de s’assurer que tout se passe bien entre les uns et l’autre, et pour combien de temps ? On ignore aussi les conséquences psychologiques pour la mère porteuse, et pour l’enfant né de cette manière.
Autant de questions auxquelles à ce jour personne ne peut apporter de réponses qui conviennent à tous le monde.
D’après leur livre témoignage (Interdits d’enfants), Dominique et Sylvie ont choisi la Californie pour avoir un enfant car la GPA est tout ce qu’il y a de plus légal. Une femme a donné ses ovocytes, une autre, qu’ils ont choisi, a prêté son utérus. Neuf mois plus tard, des jumelles naissent. Elles disposent d’un passeport américain, mais n’ont pas d’état civil français. Le consulat américain alerte immédiatement le parquet de Nantes. A leur retour en France, il y a 7 ans, le couple est accusé d’enlèvement d’enfants et d’adoption frauduleuse. Une bien triste histoire qui montre une fois de plus que la gestation pour autrui n’est pas quelque chose de simple, c’est un processus qui prend beaucoup de temps et requiert une connaissance de la législation en vigueur dans les différents pays. C’est un engagement pour une vie qui ne doit pas être prise à la légère.
Si l’on en croit un sondage Ipsos réalisé pour Top Santé, 61% des Français sont favorables à l’autorisation des mères porteuses et 33% sont contre. Quand la question les concerne directement, les sondées sont moins favorable : 55% ne se disent pas prêtes à recourir à une mère porteuse si elles ne pouvaient pas avoir d’enfant. Et seulement 17% des femmes interrogées seraient prêtes à porter un enfant pour quelqu’un qu’elles ne connaissent pas (le chiffre monte à 39% s’il s’agit de quelqu’un de très proche comme une sœur ou une amie). Il apparaît donc évident que le sujet intéresse et divise. Pour mettre en place un maximum de gardes fous afin d’assurer une éthique qui soit la plus raisonnable possible, la législation doit sans doute se mettre au diapason de l’évolution de la médecine et de celle de notre société, ainsi chacun pourra prétendre au bonheur d’avoir un enfant, ce qui semble être l’essence même de notre existence. Il restera alors à ce soucier de l’état psychologique dans lequel peut se trouver une personne qui a porté la vie pendant neuf mois et qui se retrouve ensuite sans enfant et sans droit sur celui à qui elle à donné naissance.